Certaines études suggèrent qu’un nombre élevé d’heures au travail peut augmenter le risque de diabète de type 2.
Nous avons décidé d’étudier cette question en analysant les données de chaque pays en Europe. Etre en situation de surpoids augmente aussi grandement le risque de souffrir d’un diabète de type 2. C’est pourquoi nous avons aussi regardé les données relatives au taux de surpoids sur le continent européen.
En se basant sur les chiffres de l’OCDE et de l’OMS, nous avons pu déduire les résultats suivants:
- La prévalence au diabète est en moyenne plus élevée dans les pays ayant des semaines de plus de 37,5 heures
- Dans les 5 pays ayant les heures de travail les plus longues, le pourcentage de femmes en surpoids est plus élevé que chez les hommes
- Dans les pays ayant une semaine de travail plus courte (37,5 h ou moins), le pourcentage d’hommes en surpoids est significativement plus élevé que le pourcentage de femmes en surpoids
- De la même manière, dans les pays où les semaines de travail sont les plus longues, le pourcentage de femmes diabétiques tend à être plus élevé que pour les hommes
- Inversement, dans les pays ayant un nombre hebdomadaire d’heures travaillées moins important, il y a une prévalence plus élevée de diabétiques chez la population masculine
Plusieurs facteurs non liés au mode de vie augmentent le risque de développer un diabète de type 2. Les antécédents familiaux peuvent avoir une influence. En outre, les personnes âgées de plus de 40 ans ou qui sont d’origine asiatique, africaine ou caribéenne ont aussi un risque plus important de souffrir de ce type de diabète.
Néanmoins, le fait d’être en surpoids ou de souffrir d’obésité augmentent de manière importante la probabilité de souffrir de cette maladie chronique. C’est pour cette raison que le fait de maintenir un régime alimentaire non équilibré, élevé en sucres et en graisses saturées, d’être sédentaire, de consommer en excès de l’alcool et d’avoir une pauvre hygiène de sommeil contribuent à l’obésité.
Mais quel est le lien avec le temps passé au travail?
Selon le Dr Atkinson, directeur clinique de Vivami.co, “en théorie, il y a un nombre de raisons pour lesquelles une personne travaillant beaucoup est plus susceptible d’être obèse et de développer une maladie liée au régime alimentaire”.
“On peut avancer l’idée selon laquelle plus une personne passe des heures au travail, moins elle a de temps pour cuisiner et qu’elle privilégie les options les moins équilibrées (produits transformés).”
“Si l’emploi consiste à rester sédentaire (par exemple, à travailler assis toute la journée), cela est aussi un facteur de surpoids et éventuellement de développement du diabète. Enfin, enchaîner les heures supplémentaires ou avoir un emploi particulièrement stressant peut favoriser les penchants pour une alimentation non équilibrée, la consommation d’alcool ou un manque de sommeil.
“Mais parce qu’il y a énormément de facteurs possibles à l’origine d’un diabète de type 2, il est difficile pour la recherche scientifique d’établir un lien clair de cause à effet entre cette maladie chronique et le temps passé au travail.”
En 2017, une étude à ce sujet a été publiée dans la revue BMJ Diabetes Research and Care s’appuie sur 7 000 participants et a duré 12 ans.
Elle suggère qu’il y a un risque plus élevé de diabète chez les femmes qui travaillent plus de 45 heures par semaine, en comparaison avec celles qui travaillent entre 35 et 40 heures hebdomadaires. Ce constat n’a pas été fait pour les hommes. Au contraire, cette étude scientifique semble indiquer que l’incidence de diabète diminue chez les hommes qui travaillent un grand nombre d’heures.
De manière similaire, les données que nous avons analysé permettent d’arriver à la même conclusion.
La prévalence totale au diabète est généralement plus élevée dans les pays dont le temps hebdomadaire passé au travail est important. Plus précisément, notre carte montre les éléments suivants:
- Dans les pays où la moyenne hebdomadaire d’heures travaillées est entre 37,5 et 39,9 heures, la prévalence au diabète est de 9%
- Entre 40 et 44,9 heures travaillées par semaine, la prévalence moyenne au diabète est de 9,6%
- Au delà de 45 heures, la prévalence atteint 9,9%
Inversement, la prévalence moyenne de diabète pour les pays dont le nombre d’heures au travail varie entre 35 et 37,4 heures est de 7,7%. Lorsque le nombre d’heures travaillées est entre 30 et 34,9 heures, la prévalence au diabète chute à 6,1%.
Concernant la prévalence au surpoids, il ne semble pas avoir de lien direct avec le nombre d’heures passées au travail. Cependant, nous avons quand même remarqué certaines spécificités liées au genre.
- Les pays dont le nombre hebdomadaires d’heures travaillées est le plus élevé (entre 43 et 47,7 heures par semaine), le pourcentage de femmes en situation de surpoids est plus haut que pour les hommes
- A l’opposé, on constate un taux de surpoids masculin élevé pour les pays ayant le nombre d’heures travaillées le plus important
- Dans les 5 pays ayant les semaines travaillées les plus courtes, la prévalence au surpoids chez les deux sexe évolue entre 12,7% et 17,5%
Il n’est pas possible d’établir de conclusions concrètes sur les raisons à l’origine de ces observations.
Néanmoins, les activités privilégiées selon le genre en dehors du travail joueraient un rôle. Est-ce que les hommes ayant des semaines hebdomadaires au travail plus courtes auraient des activités sédentaires?
Evidemment, les différences culturelles sont aussi un facteur non négligeable. Sans rentrer dans les clichés, on peut se poser les questions suivantes: quelle est la part des femmes travaillant à temps plein? Est-ce que les femmes sont plus ou moins représentées dans les secteurs professionnels traditionnellement ‘masculins’ ? Ce sont autant de facteurs à prendre en compte.
Comment interpréter ces chiffres?
Encore une fois, on ne peut pas expliquer les causes à l’origine de ces chiffres. Il n’y a pas de raison évidente. Les données interprétées sont simplement une observation et doivent être associées à de multiples causes permettant d’expliquer les prévalences importantes au diabète et au surpoids dans certains pays.
Cependant, bien que ces données ne permettent pas d’offrir une réponse claire, elles peuvent aider à identifier les comportements augmentant le risque de maladies liées à l’alimentation (des maladies en constante augmentation dans de nombreux pays européens). Ces chiffres peuvent donc nous aider à mettre en lumière les points sur lesquels travailler.
Dr Daniel Atkinson note que “ces chiffres ne permettent pas d’expliquer pourquoi un nombre élevé d’heures travaillées peut augmenter le risque de diabète… De nombreux facteurs environnementaux et liés au mode de vie peuvent avoir un réel impact. Mais cette corrélation entre heures de travail et diabète ou surpoids posent des questions concernant notre manière de travailler, le temps passé sur le lieux de travail et notre manière de nous alimenter.”
Comment empêcher qu’une charge de travail importante affecte notre santé?
Il est primordial de maintenir un équilibre sain entre vie professionnelle et personnelle. Réfléchissez à votre manière de vous alimenter au travail. En vous assurant de contrôler au mieux ce que vous mangez au travail, notamment en préparant votre déjeuner, vous assurer un meilleur contrôle sur votre alimentation.
Comme Dr Atkinson nous l’explique, “si vous êtes stressé ou manquez de temps, vous augmentez la probabilité de céder à une alimentation pas forcément saine et d’être moins physiquement actif. Sur le long terme, cela peut avoir des conséquences néfastes sur votre état de santé. Néanmoins, il est tout à fait possible de lutter contre le stress lié au travail.”
“Ce n’est pas toujours facile mais une fois que vous avez quitté votre travail, essayez de couper totalement en ne regardant pas vos emails ou messages. Il est essentiel d’établir une frontière claire entre la vie personnelle et professionnelle. C’est le meilleur moyen de réduire le stress. Si votre emploi vous impose de rester sédentaire, il ne faut pas oublier de bouger suffisamment en dehors de vos heures de travail. Vous pouvez vous rendre dans une salle de sport, mais ce n’est évidemment pas l’unique solution. Marcher, nager, ne pas être sédentaire, vous aideront à conserver un poids équilibré. Etre actif est aussi bénéfique pour votre santé mentale et aide à couper avec le stress lié au monde professionnel.”
Si vous vous posez des questions concernant votre régime alimentaire ou la manière de réduire le risque de développer un diabète, n’hésitez pas à en parler à votre médecin généraliste. Il sera le mieux à même pour vous conseiller.